L’APRÈS COVID : Quels seront les bureaux gagnants et perdants ?

L’APRÈS COVID : Quels seront les bureaux gagnants et perdants ?

Immobilier - 13/01/2021

La crise sanitaire actuelle accélère certaines mutations profondes des bureaux déjà présentes avant la Covid-19. Les premiers impacts des nouveaux besoins d’hybridation et de diversité des espaces ont fait leur apparition.

Décryptage par Coralie COUVRET, directrice du Pôle Immobilier & Baya DERRICHE, responsable des Études Immobilières chez Galtier Valuation en partenariat avec la Lettre M².

 

Face à la crise sanitaire, certains disent que les surfaces de bureaux vont être réduites. Qu’en pensez-vous ?

La crise sanitaire est un accélérateur des mutations de notre société qui interpelle sur les modes de vie et de consommation. Face aux incertitudes économiques, aux réflexions profondes sur le flex office et le télétravail, le marché tertiaire est au centre de toutes les attentions. Les organisations se transforment et le bureau doit évoluer dans sa conception, son usage, sa localisation et aussi sur le plan environnemental. On viendra au bureau pour trouver autre chose qu’un simple poste de travail et les locaux devront être optimisés en fonction de leurs utilisations. Les surfaces des bureaux pourraient être restreintes. Mais le seront-elles vraiment ? Dans quelle proportion et sur quelles localisations ? A ce jour, la réponse est difficile à quantifier. Ne faudrait-il pas au préalable s’interroger sur l’adaptabilité des surfaces et sur leurs relocalisations pour s’orienter vers des m² mieux exploités et à valeur ajoutée ? Même si nous observons des incertitudes face à l’usage du télétravail, il nous faudra, lors de nos expertises, différencier le temps de la crise et celui de l’après-crise. Les analyses des marchés devront dissocier les besoins de réduction des surfaces pour des raisons économiques et celles générées par le télétravail. Des nécessités émergeront pour des surfaces partagées et hybrides dans des sites plus proches des lieux des résidences. Cela devrait permettre de développer des activités tertiaires dans des secteurs délaissés et donc d’augmenter la valeur de certains actifs auparavant inoccupés.

A l’avenir, le format des baux 3/6/9 pourrait être moins fréquent, relevez-vous cette tendance ?

Le bail commercial avec une durée ferme demeure sécurisant pour les investisseurs. Mais, aujourd’hui, certaines entreprises souhaitent revoir leurs modes d’occupation et/ou recherchent de la flexibilité sans forcément recourir au coworking. Compte tenu des contraintes des baux commerciaux en cours, ces changements ne pourront pas être tous immédiats. Ces évolutions vont probablement accroître les demandes de baux sans durée ferme, des baux dérogatoires ou des besoins de sous-location. Rappelons que le bail dérogatoire permet de s’engager sur des périodes moins longues que dans le cadre d’un bail commercial, mais il faut être attentif aux risques de requalification. Quant à la sous-location, elle est conditionnée par les termes du bail. A ce jour, nous ne relevons pas encore une tendance à la hausse sur nos expertises, mais elle s’avérerait être une réponse pour fluidifier le marché. On peut aussi s’interroger sur la pertinence et l’urgence de faire évoluer le régime des baux commerciaux.

Comment l’expert en évaluation immobilière va intégrer ces nouveaux paramètres ?

Il est important de rappeler que l’expert ne fait pas le marché mais qu’il l’analyse sans pour autant l’anticiper. Nous étudions les facteurs de la valeur, actif par actif, et tenons compte des mutations avérées. Il faudra, probablement, avoir une approche complémentaire et plus « hôtelière » sur l’exploitation et l’occupation des immeubles de bureaux (le nombre de postes de travail, la flexibilité des espaces, des usages, des services…) en complément des analyses financières classiques. On parle d’accélérateur d’obsolescence et de la dévalorisation des actifs « perdants ». La distinction se fera sur les actifs plus pérennes et flexibles, répondant aussi aux exigences environnementales. Nous pouvons aussi invoquer la valorisation des actifs « gagnants » correspondant à tous les critères des utilisateurs. L’expert en valeur immobilière devra intégrer ces nouveaux paramètres en mutation dans la réalisation de ses missions.